"Il neige en moi.
Il bourrasque.
À nouveau la contrée gèle en moi.
Mais le sang la sève le grand cri
poussent en moi le souffle,
le germe sous la glace,
l'absurde incantation de vivre."
(Yves Préfontaine, Les mots tremblent)
vendredi 28 novembre 2008
mercredi 26 novembre 2008
La possibilité d'une libération
"Nul socle nulle épaule.
Nulle paume où poser la sienne."
"Naufrage n'est que passage.
Désordre et chaos ne sont que passages
avant la parole d'un paysage foudroyant
pour l'homme enfin libre de lui-même."
(Yves Préfontaine, Les mots tremblent)
Nulle paume où poser la sienne."
"Naufrage n'est que passage.
Désordre et chaos ne sont que passages
avant la parole d'un paysage foudroyant
pour l'homme enfin libre de lui-même."
(Yves Préfontaine, Les mots tremblent)
mardi 25 novembre 2008
Quelques crève-coeurs
Diagnostic fatal
Impuissance lancinante
Devoir choisir pour toi ta dernière robe
La robe portée au mariage de ton fils
Te savoir seule la nuit dans cette inhospitalière chambre d'hôpital
Désir de cogner, de frapper, de lutter, de refuser ta mortalité, ma déesse-mère
Ma nièce venant vers moi en pleurs et tenant dans ses mains le dessin mal caché qu'elle t'avait offert à l'hôpital... L'horrible perspicacité d'une enfant de quatre ans
Ton fauteuil vide...roulant à vide
Ton odeur et ton rire... à jamais disparus
Ton odeur qui s'efface de tes vêtements et l'écho numérique de ton rire dans ma caméra
Ma dernière caresse dans tes cheveux, mon dernier baiser amoureux sur ton front glacé
Le dernier dessin que ta petite-fille a délicatement posé sur ton corps qu'on lui a dit endormi, avant que cette affreuse boîte ne t'encloisonne
Ta mère en pleurs
L'égarement de ton inconsolable époux, mon père
Le profond désespoir de ta première, refugiée furtivement dans mes bras
Le courage de ton dernier, émotivement campé à mes côtés
La belle feuille d'automne que ta petite-fille m'a spontanément donnée durant la cérémonie religieuse
Ma sereine et profonde colère qui continue de gronder
Cette nausée qui ne semble plus me quitter
Ta fin, le commencement de ma fin ?
Voir ton ombre à travers moi tous les jours dans le miroir
Ne pas savoir où tu es
Ta dernière leçon : "Ne pleures pas", la plus difficle à apprendre
Mes dernières et sincères paroles
Tes clins d'oeil et sourires d'encouragement alors que tu ne pouvais déjà plus parler
Cette envie de vomir, cette envie de mourir
Ce dernier maquillage, ce dernier massage, ce dernier bon repas et ce dernier verre de vin souhaités par toi qui te savait condamnée
Oui, on savait bien que ton pays, c'était la vie
Penser que tu aies attendu que je parte pour partir à ton tour
Maintenant
Vide, tout semble vide
Une immense vie vide
Où es-tu ? Es-tu bien maintenant ? Es-tu rien maintenant?
Hors de moi d'être hors de toi... pour une deuxième et dernière fois
Deuxième et irréversible rupture
Que veux-tu que cela me fasse de savoir que la peine s'efface un jour, en cet instant péniblement présent
Ne pas se résoudre aux adieux
Mais se résoudre à demeurer partiellement brisée, partiellement morte
Orpheline
Se questionner
À qui maintenant le tour... le macabre tour de manège ?
Impuissance lancinante
Devoir choisir pour toi ta dernière robe
La robe portée au mariage de ton fils
Te savoir seule la nuit dans cette inhospitalière chambre d'hôpital
Désir de cogner, de frapper, de lutter, de refuser ta mortalité, ma déesse-mère
Ma nièce venant vers moi en pleurs et tenant dans ses mains le dessin mal caché qu'elle t'avait offert à l'hôpital... L'horrible perspicacité d'une enfant de quatre ans
Ton fauteuil vide...roulant à vide
Ton odeur et ton rire... à jamais disparus
Ton odeur qui s'efface de tes vêtements et l'écho numérique de ton rire dans ma caméra
Ma dernière caresse dans tes cheveux, mon dernier baiser amoureux sur ton front glacé
Le dernier dessin que ta petite-fille a délicatement posé sur ton corps qu'on lui a dit endormi, avant que cette affreuse boîte ne t'encloisonne
Ta mère en pleurs
L'égarement de ton inconsolable époux, mon père
Le profond désespoir de ta première, refugiée furtivement dans mes bras
Le courage de ton dernier, émotivement campé à mes côtés
La belle feuille d'automne que ta petite-fille m'a spontanément donnée durant la cérémonie religieuse
Ma sereine et profonde colère qui continue de gronder
Cette nausée qui ne semble plus me quitter
Ta fin, le commencement de ma fin ?
Voir ton ombre à travers moi tous les jours dans le miroir
Ne pas savoir où tu es
Ta dernière leçon : "Ne pleures pas", la plus difficle à apprendre
Mes dernières et sincères paroles
Tes clins d'oeil et sourires d'encouragement alors que tu ne pouvais déjà plus parler
Cette envie de vomir, cette envie de mourir
Ce dernier maquillage, ce dernier massage, ce dernier bon repas et ce dernier verre de vin souhaités par toi qui te savait condamnée
Oui, on savait bien que ton pays, c'était la vie
Penser que tu aies attendu que je parte pour partir à ton tour
Maintenant
Vide, tout semble vide
Une immense vie vide
Où es-tu ? Es-tu bien maintenant ? Es-tu rien maintenant?
Hors de moi d'être hors de toi... pour une deuxième et dernière fois
Deuxième et irréversible rupture
Que veux-tu que cela me fasse de savoir que la peine s'efface un jour, en cet instant péniblement présent
Ne pas se résoudre aux adieux
Mais se résoudre à demeurer partiellement brisée, partiellement morte
Orpheline
Se questionner
À qui maintenant le tour... le macabre tour de manège ?
dimanche 23 novembre 2008
Bonjour Solitude
"Ce fut l'expérience la plus importance de ma vie: toucher les mains de ma mère morte, poser à mon tour les doigts sur son visage, sentir par cela que commençait une solitude dont je ne sortirais plus."
"Je découvrais que la douleur n'est pas comme le puits bizarre où commencent nos pleurs: nul feu ne la tarit jamais, et sa forge ne se fatigue pas de brûler. Une plaie cuisante fait le fond de l'homme, et le corps, on dirait, apprend à marcher malgré cela. Mais tout homme boitille."
(Jean-François Beauchemin, Ceci est mon corps)
"Je découvrais que la douleur n'est pas comme le puits bizarre où commencent nos pleurs: nul feu ne la tarit jamais, et sa forge ne se fatigue pas de brûler. Une plaie cuisante fait le fond de l'homme, et le corps, on dirait, apprend à marcher malgré cela. Mais tout homme boitille."
(Jean-François Beauchemin, Ceci est mon corps)
samedi 22 novembre 2008
Notre Mère qui êtes aux cieux
"Souvent l'amour est un pauvre habitat
l'étroit placard de soi où ébaucher la valse du monde
un langage absurde, une petitesse à deux
mais avec nous il était merveilleux
tu créais son déroulement"
(Hélène Monette, Thérèse pour joie et orchestre)
l'étroit placard de soi où ébaucher la valse du monde
un langage absurde, une petitesse à deux
mais avec nous il était merveilleux
tu créais son déroulement"
(Hélène Monette, Thérèse pour joie et orchestre)
Notre Mère qui êtes aux cieux
"Souvent l'amour est un pauvre habitat
l'étroit placard de soi où ébaucher la valse du monde
un langage absurde, une petitesse à deux
mais avec nous il était merveilleux
tu créais son déroulement
l'étroit placard de soi où ébaucher la valse du monde
un langage absurde, une petitesse à deux
mais avec nous il était merveilleux
tu créais son déroulement
mercredi 19 novembre 2008
Et vous, quelle est votre "part manquante" ?
"Ce n'est pas pour devenir écrivain qu'on écrit. C'est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour."
(Christian Bobin, La part manquante)
(Christian Bobin, La part manquante)
samedi 15 novembre 2008
Éteindre le tonnerre qui gronde
"Arrête de porter
Tout l'poids du destin
Sur ton dos
J's'rai encore là demain
Même s'il fait pas plus beau
Éteins le tonnerre
Qui gronde en toi ma belle Sophie
Tsé qu'on est que du monde
Et qu'le monde est petit
Tout petit
Pour tout savoir
Pour tout comprendre
Beaucoup de choses plus grandes
Plus grandes que nous
Mais p't'-être bien que des fois
Y'a tout simplement rien
Rien à comprendre
Pourquoi si tôt elle est partie
Laissant un chagrin trop gros
Dans tes yeux
Rien à faire du bon Dieu
Quand on trouve pas les mots
Pour expliquer
Mais arrête de pleurer
Ma belle Sophie
Dis-toi qu'il y a un ciel
Caché dans ton nuage
Et que même la peine
Que tu traînes comme un bagage
N'est pas immortelle..."
(Les Cowboys Fringants, "Ma belle Sophie", La grande messe)
Tout l'poids du destin
Sur ton dos
J's'rai encore là demain
Même s'il fait pas plus beau
Éteins le tonnerre
Qui gronde en toi ma belle Sophie
Tsé qu'on est que du monde
Et qu'le monde est petit
Tout petit
Pour tout savoir
Pour tout comprendre
Beaucoup de choses plus grandes
Plus grandes que nous
Mais p't'-être bien que des fois
Y'a tout simplement rien
Rien à comprendre
Pourquoi si tôt elle est partie
Laissant un chagrin trop gros
Dans tes yeux
Rien à faire du bon Dieu
Quand on trouve pas les mots
Pour expliquer
Mais arrête de pleurer
Ma belle Sophie
Dis-toi qu'il y a un ciel
Caché dans ton nuage
Et que même la peine
Que tu traînes comme un bagage
N'est pas immortelle..."
(Les Cowboys Fringants, "Ma belle Sophie", La grande messe)
dimanche 9 novembre 2008
mercredi 5 novembre 2008
Trois mots gravés en or
I
La chambre est pleine d'ombre ; on entend vaguement
De deux enfants le triste et doux chuchotement.
Leur front se penche, encore alourdi par le rêve,
Sous le long rideau blanc qui tremble et se soulève...
- Au dehors les oiseaux se rapprochent frileux ;
Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux ;
Et la nouvelle Année, à la suite brumeuse,
Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse,
Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant...
II
Or les petits enfants, sous le rideau flottant,
Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure.
Ils écoutent, pensifs, comme un lointain murmure...
Ils tressaillent souvent à la claire voix d'or
Du timbre matinal, qui frappe et frappe encor
Son refrain métallique et son globe de verre...
- Puis, la chambre est glacée...on voit traîner à terre,
Épars autour des lits, des vêtements de deuil :
L'âpre bise d'hiver qui se lamente au seuil
Souffle dans le logis son haleine morose !
On sent, dans tout cela, qu'il manque quelque chose...
- Il n'est donc point de mère à ces petits enfants,
De mère au frais sourire, aux regards triomphants ?
Elle a donc oublié, le soir, seule et penchée,
D'exciter une flamme à la cendre arrachée,
D'amonceler sur eux la laine de l'édredon
Avant de les quitter en leur criant : pardon.
Elle n'a point prévu la froideur matinale,
Ni bien fermé le seuil à la bise hivernale ?...
- Le rêve maternel, c'est le tiède tapis,
C'est le nid cotonneux où les enfants tapis,
Comme de beaux oiseaux que balancent les branches,
Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches.
- Et là, - c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur,
Où les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur;
Un nid que doit avoir glacé la bise amère...
III
Votre coeur l'a compris : - ces enfants sont sans mère,
Plus de mère au logis ! - et le père est bien loin !...
- Une vieille servante, alors, en a pris soin.
Les petits sont tout seuls en la maison glacée ;
Orphelins de quatre ans, voilà qu'en leur pensée
S'éveille, par degrés, un souvenir riant...
C'est comme un chapelet qu'on égrène en priant :
- Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaieté permise !
IV
Ah ! c'était si charmant, ces mots dits tant de fois !
- Mais comme il est changé, le logis d'autrefois :
Un grand feu pétillait, clair, dans la cheminée,
Toute la vieille chambre était illuminée ;
Et les reflets vermeils, sortis du grand foyer,
Sur les meubles vernis aimaient à tournoyer...
- L'armoire était sans clefs !... sans clefs, la grande armoire !
On regardait souvent sa porte brune et noire...
Sans clefs !... c'était étrange !... on rêvait bien des fois
Aux mystères dormant entre ses flancs de bois,
Et l'on croyait ouïr, au fond de la serrure
Béante, un bruit lointain, vague et joyeux murmure...
- La chambre des parents est bien vide, aujourd'hui :
Aucun reflet vermeil sous la porte n'a lui ;
Il n'est point de parents, de foyer, de clefs prises :
Partant, point de baisers, point de douces surprises !
Oh ! que le jour de l'an sera triste pour eux !
- Et, tout pensifs, tandis que de leurs grands yeux bleus,
Silencieusement tombe une larme amère,
Ils murmurent : "Quand donc reviendra notre mère ?"
.......................................................................
V
Maintenant, les petits sommeillent tristement :
Vous diriez, à les voir, qu'ils pleurent en dormant,
Tant leurs yeux sont gonflés et leur souffle pénible !
Les tout petits enfants ont le coeur si sensible !
- Mais l'ange des berceaux vient essuyer leurs yeux,
Et dans ce lourd sommeil met un rêve joyeux,
Un rêve si joyeux, que leur lèvre mi-close,
Souriante, semblait murmurer quelque chose...
- Ils rêvent que, penchés sur leur petit bras rond,
Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose...
Au foyer plein d'éclairs chante gaiement le feu...
Par la fenêtre on voit là-bas un beau ciel bleu ;
La nature s'éveille et de rayons s'enivre...
La terre, demie-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et dans le vieux logis tout est tiède et vermeil :
Les sombres vêtements ne jonchent plus la terre,
La bise sous le seuil a fini par se taire...
On dirait qu'une fée a passé dans cela !...
- Les enfants, tout joyeux, ont jeté deux cris... Là,
Près du lit maternel, sous un beau rayon rose,
Là, sur le grand tapis, resplendit quelque chose...
Ce sont des médaillons argentés, noirs et blancs,
De la nacre et du jais aux reflets scintillants ;
Des petits cadres noirs, des couronnes de verre,
Ayant trois mots gravés en or : "A NOTRE MERE !"
(Arthur Rimbaud, 2 janvier 1870)
La chambre est pleine d'ombre ; on entend vaguement
De deux enfants le triste et doux chuchotement.
Leur front se penche, encore alourdi par le rêve,
Sous le long rideau blanc qui tremble et se soulève...
- Au dehors les oiseaux se rapprochent frileux ;
Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux ;
Et la nouvelle Année, à la suite brumeuse,
Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse,
Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant...
II
Or les petits enfants, sous le rideau flottant,
Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure.
Ils écoutent, pensifs, comme un lointain murmure...
Ils tressaillent souvent à la claire voix d'or
Du timbre matinal, qui frappe et frappe encor
Son refrain métallique et son globe de verre...
- Puis, la chambre est glacée...on voit traîner à terre,
Épars autour des lits, des vêtements de deuil :
L'âpre bise d'hiver qui se lamente au seuil
Souffle dans le logis son haleine morose !
On sent, dans tout cela, qu'il manque quelque chose...
- Il n'est donc point de mère à ces petits enfants,
De mère au frais sourire, aux regards triomphants ?
Elle a donc oublié, le soir, seule et penchée,
D'exciter une flamme à la cendre arrachée,
D'amonceler sur eux la laine de l'édredon
Avant de les quitter en leur criant : pardon.
Elle n'a point prévu la froideur matinale,
Ni bien fermé le seuil à la bise hivernale ?...
- Le rêve maternel, c'est le tiède tapis,
C'est le nid cotonneux où les enfants tapis,
Comme de beaux oiseaux que balancent les branches,
Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches.
- Et là, - c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur,
Où les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur;
Un nid que doit avoir glacé la bise amère...
III
Votre coeur l'a compris : - ces enfants sont sans mère,
Plus de mère au logis ! - et le père est bien loin !...
- Une vieille servante, alors, en a pris soin.
Les petits sont tout seuls en la maison glacée ;
Orphelins de quatre ans, voilà qu'en leur pensée
S'éveille, par degrés, un souvenir riant...
C'est comme un chapelet qu'on égrène en priant :
- Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaieté permise !
IV
Ah ! c'était si charmant, ces mots dits tant de fois !
- Mais comme il est changé, le logis d'autrefois :
Un grand feu pétillait, clair, dans la cheminée,
Toute la vieille chambre était illuminée ;
Et les reflets vermeils, sortis du grand foyer,
Sur les meubles vernis aimaient à tournoyer...
- L'armoire était sans clefs !... sans clefs, la grande armoire !
On regardait souvent sa porte brune et noire...
Sans clefs !... c'était étrange !... on rêvait bien des fois
Aux mystères dormant entre ses flancs de bois,
Et l'on croyait ouïr, au fond de la serrure
Béante, un bruit lointain, vague et joyeux murmure...
- La chambre des parents est bien vide, aujourd'hui :
Aucun reflet vermeil sous la porte n'a lui ;
Il n'est point de parents, de foyer, de clefs prises :
Partant, point de baisers, point de douces surprises !
Oh ! que le jour de l'an sera triste pour eux !
- Et, tout pensifs, tandis que de leurs grands yeux bleus,
Silencieusement tombe une larme amère,
Ils murmurent : "Quand donc reviendra notre mère ?"
.......................................................................
V
Maintenant, les petits sommeillent tristement :
Vous diriez, à les voir, qu'ils pleurent en dormant,
Tant leurs yeux sont gonflés et leur souffle pénible !
Les tout petits enfants ont le coeur si sensible !
- Mais l'ange des berceaux vient essuyer leurs yeux,
Et dans ce lourd sommeil met un rêve joyeux,
Un rêve si joyeux, que leur lèvre mi-close,
Souriante, semblait murmurer quelque chose...
- Ils rêvent que, penchés sur leur petit bras rond,
Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose...
Au foyer plein d'éclairs chante gaiement le feu...
Par la fenêtre on voit là-bas un beau ciel bleu ;
La nature s'éveille et de rayons s'enivre...
La terre, demie-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et dans le vieux logis tout est tiède et vermeil :
Les sombres vêtements ne jonchent plus la terre,
La bise sous le seuil a fini par se taire...
On dirait qu'une fée a passé dans cela !...
- Les enfants, tout joyeux, ont jeté deux cris... Là,
Près du lit maternel, sous un beau rayon rose,
Là, sur le grand tapis, resplendit quelque chose...
Ce sont des médaillons argentés, noirs et blancs,
De la nacre et du jais aux reflets scintillants ;
Des petits cadres noirs, des couronnes de verre,
Ayant trois mots gravés en or : "A NOTRE MERE !"
(Arthur Rimbaud, 2 janvier 1870)
mardi 4 novembre 2008
On a demandé au Dalaï-Lama
"Qu'est-ce qui vous surprend le plus dans l'humanité ?"
Il a répondu :
"Les hommes... Parce qu'ils perdent la santé pour accumuler de l'argent, ensuite ils perdent de l'argent pour retrouver la santé.
Et à penser anxieusement au futur, ils oublient le présent de telle sorte qu'ils finissent par non vivre ni le présent ni le futur.
Ils vivent comme s'ils n'allaient jamais mourir...Et meurent comme s'ils n'avaient jamais vécu."
Il a répondu :
"Les hommes... Parce qu'ils perdent la santé pour accumuler de l'argent, ensuite ils perdent de l'argent pour retrouver la santé.
Et à penser anxieusement au futur, ils oublient le présent de telle sorte qu'ils finissent par non vivre ni le présent ni le futur.
Ils vivent comme s'ils n'allaient jamais mourir...Et meurent comme s'ils n'avaient jamais vécu."
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