samedi 29 décembre 2007

Tragique analyse

"Compte tenu du système socio-économique mis en place, compte tenu surtout de nos présupposés philosophiques, il est visible que l'humain se précipite vers une catastrophe à brève échéance, et dans des conditions atroces; nous y sommes déjà. La conséquence logique de l'individualisme c'est le meurtre, et le malheur. L'enthousiasme qui nous anime dans cette perte est remarquable; vraiment très curieux. Il est par exemple étonnant de voir avec quelle insouciance joyeuse on vient d'évacuer la psychanalyse - qui c'est vrai le méritait bien - pour la remplacer par une lecture réductionniste de l'humain à base d'hormones et de neuromédiateurs. La dissolution progressive au fil des siècles des structures sociales et familiales, la tendance croissante des individus à se percevoir comme des particules isolées, soumises à la loi des chocs, agrégats provisoires de particules plus petites... tout cela rend bien sûr inapplicable la moindre solution politique. Il est donc légitime de commencer par déblayer les sources d'optimisme creux. En revenant à une analyse plus philosophique des choses, on se rend compte que la situation est encore plus étrange qu'on le croyait. Nous avançons vers le désastre, guidés par une image fausse du monde; et personne ne le sait."

(Michel Houellebecq)

mercredi 19 décembre 2007

Basculement et amoindrissement

"C'est une sensation curieuse, de sentir sa vie qui bascule; il suffit de rester là, sans rien faire, d'éprouver la sensation de basculement."

"Je ne souffrais pas, mais je me sentais, effectivement, amoindri; je me sentais amoindri au-delà du possible. Il me demanda ce que j'avais l'intention de faire. Je répondis: "Attendre". Je me montrai raisonnablement optimiste; je lui déclarai que toute cette tristesse allait prendre fin, que j'allais retrouver mon bonheur, mais qu'il me fallait encore attendre. Il ne parut pas réellement convaincu."

(Michel Houellebecq, Plateforme)

dimanche 16 décembre 2007

Nous verrons bien

Il était une fois un pauvre fermier qui avait perdu son unique cheval. Alors que ses amis et ses voisins déploraient son malheur, il restait imperturbable. "Nous verrons bien", dit-il avec un sourire énigmatique.
Plusieurs jours plus tard, son cheval réapparut accompagné de cinq étalons sauvages qu'il avait rencontré en chemin. Ses voisins se réjouirent de sa bonne fortune mais il ne semblait pas très enthousiaste. "Nous verrons bien", répéta-t-il.
La semaine suivante, alors qu'il essayait de monter et d'apprivoiser l'un des étalons, son fils unique bien-aimé tomba et se cassa la jambe. Les voisins toujours aussi attentionnés en étaient chagrinés mais le fermier, qui réconforta et soigna pourtant son fils, ne s'inquiétait pas pour l'avenir. "Nous verrons bien", commenta-t-il.
À la fin du mois, le seigneur local de la guerre arriva dans le village du fermier pour enrôler tous les jeunes gens valides afin de combattre dans la dernière campagne. Quant au fils du fermier... je vous laisse terminer l'histoire.

vendredi 14 décembre 2007

Tragiques

"Notre existence dépourvue de passions était celle de vieillards; nous portions sur le monde un regard empreint d'une lucidité sans bienveillance. Le monde animal était connu, les sociétés humaines étaient connues; tout cela ne recelait aucun mystère, et rien ne pouvait en être attendu, hormis la répétition du carnage."

(Michel Houellebecq, La possibilité d'une île)

mercredi 12 décembre 2007

Quelqu'un a dit un jour

Travaille - comme si tu n'avais pas besoin d'argent,
Danse - comme si personne ne te regardait,
Chante - comme si personne ne t'écoutait,
Aime - comme si personne ne t'avait blessé
Vis - comme si, ici, c'était le Paradis sur terre.

mardi 4 décembre 2007

Trois âges

"Pendant la première partie de sa vie, on ne se rend compte de son bonheur qu'après l'avoir perdu. Puis vient un âge, un âge second, où l'on sait déjà, au moment où l'on commence à vivre un bonheur, que l'on va, au bout du compte, le perdre (...). Je compris également que je n'avais pas atteint l'âge tiers, celui de la vieillesse véritable, où l'anticipation de la perte du bonheur empêche même de la vivre."

(Michel Houellebecq, La Possibilité d'une île)

dimanche 2 décembre 2007

Sommes-nous capables de la relation ?

"Savons-nous accueillir l'autre, savons-nous accueillir l'etranger, savons-nous accueillir l'inconnu, sommes-nous capables du risque de l'autre, sommes-nous capables de la relation ?"

(Yvan Amar)