mardi 29 avril 2008

Rester vivant

"Un poète mort n'écrit plus. D'où l'importance de rester vivant."

(Michel Houellebecq, Rester vivant)

mercredi 23 avril 2008

Les limites de la philosophie

"J'ai étudié consciencieusement la maladie d'un point de vue philosophique. Il me semble que ce que j'en ai lu ne m'a rien appris. Ne m'a rien permis de comprendre. Ne m'a prévenue de rien. En matière de souffrance, la philosophie est d'un piètre secours. Au fur et à mesure, son discours posé et abstrait m'est devenu intolérable. Sonnait comme une hypocrisie de plus. Une autre voix s'est substituée à la parole docile."

(Claire Marin, Hors de moi)

mardi 22 avril 2008

La Chanson de Charles Quint

"Mille regretz de vous habandonner,
Et deslonger vostre fache amoureuse,
J'ay si grand deuil et paine douloureuse
Qu'on me verra brief mes jours definer."

(Anonyme, cité dans Erik Orsenna, La chanson de Charles Quint)

vendredi 18 avril 2008

Théorie du voyage

"Soi, voilà la grande affaire du voyage. Soi, et rien d'autre. Ou si peu. Des prétextes, des occasions, des justifications en quantité, certes, mais, en fait, on se met en route mû seulement par le désir de partir à sa propre rencontre dans le dessein, très hypothétique, de se retrouver, sinon de se trouver. Le tour de la planète ne suffit pas toujours pour obtenir ce face à face. Une existence non plus, parfois. Combien de détours, et pour quels lieux, avant de se savoir en présence de ce qui soulève un peu le voile de l'être? Les trajets de voyageurs coïncident toujours, en secret, avec des quêtes initiatiques qui mettent en jeu l'identité. Là encore le voyageur et le touriste se distinguent radicalement, s'opposent définitivement. L'un quête sans cesse et trouve parfois, l'autre ne cherche rien, et, par conséquent, n'obtient rien non plus."

(Michel Onfray, Théorie du voyage)

mercredi 16 avril 2008

Existence

"Il faut se souvenir que la non-visibilité, la non-palpabilité et la non-sensibilité d'une chose ne sont pas des preuves de sa non-existence."

(Amadou Hampâté Bâ)

mardi 15 avril 2008

Trajet socratique

"Voyager mène inoxerablement vers sa subjectivité. Morcelée, fragmentée, éparpillée ou compacte, en bloc, on finit toujours par se trouver face à soi-même, comme devant un miroir qui vous invite à faire le bilan de notre trajet socratique : qu'ai-je appris de moi? Que puis-je savoir de plus sûr qu'avant mon départ?"

(Michel Onfray, Théorie du voyage)

dimanche 13 avril 2008

Voyager

"Voyager met en demeure de fonctionner à plein sensuellement. Émotion, affection, enthousiasme, étonnement, interrogation, surprise, joie et stupéfaction, tout se mélange dans l’exercice du beau et du sublime, du dépaysement et de la différence."

(Michel Onfray, Théorie du voyage)

vendredi 11 avril 2008

Géographie sentimentale

« Il existe toujours une géographie qui correspond à un tempérament. Reste à la trouver. »

(Michel Onfray, Théorie du voyage)

jeudi 10 avril 2008

Hiver

"Pourquoi, si souvent, est-ce à la fin de l'hiver qu'il fait le plus froid ?"

(Erik Orsenna, La chanson de Charles Quint)

mercredi 9 avril 2008

Quel être êtes-vous ?

"Il y a des êtres d'imparfait, les plus mous dans le goût de vivre: la nostalgie n'est pas bonne pour l'appétit.
Il y a des êtres du passé simple: ils rompent, à tout bout de champ, on ne sait pas pour qui ni pour quoi, peut être pour le seul plaisir d'entendre le couteau trancher.
Il y a des êtres capables de présent: ce sont les plus faciles à vivre puisqu'ils sont dans leur vie. Ils ont cette politesse qu'on pourrait croire banale et naturelle, alors que c'est une rareté : la politesse d'être là."

(Erik Orsenna, La chanson de Charles Quint)

mardi 8 avril 2008

Exil

"Continuer sans, continuer quoi, continuer qui, mais plus avec...plus là. Et le corps parti, séparé, amputé du coeur et de l'esprit ne devient que support, tremplin et puis rien...Sublimé par tant de légèreté. Et pourtant quelle lourdeur dans l'exil!"

(Tania Hadjithomas Mehanna)

dimanche 6 avril 2008

Gynocide

"Il entend des cris de joie dans les maisons berbères saluant la naissance d'un garçon et des lamentations si c'est une fille. Il a traversé des villages dans les campagnes de Chine où les mères se pendent si elles enfantent une fille. Il a vu en Inde, où il manque cinquante millions de femmes, le visage des victimes qu'on a tenté de brûler. Il a lu dans le Coran - ce bégaiement paniqué de berger hagard - le mépris ruisselant de stupidité dans lequel est tenue la femme. Il sait qu'en Europe, autour de lui, sous ses yeux, la situation n'est pas plus heureuse. Dans les champs tropicaux qu'il a traversés, il n'a souvent vu que la silhouette des femmes affairées aux moissons pendant que les hommes s'adonnaient à cette occupation qui tient en haleine, chaque jour des milliards d'entre eux: suivre l'ombre d'un arbre au fur et à mesure que le soleil se déplace dans le ciel. Dans des pays de sable et de soleil se déplace dans le ciel. Dans des pays de sable et de soleil, il a partagé des dîners à la table du maître de maison pendant que la mère de famille se nourrissait par terre de ce qu'on lui laissait. Il a rencontré des familles composées de petits garçons gras comme des poussahs entourés de fillettes aux côtes saillantes. (...) Et c'est ainsi que, malgré lui, il a perdu son humanisme. Il ne comprend pas pourquoi l'humanité se rend coupable d'un gynocide permanent (dont les victimes n'ont même pas, elles, le baume du devoir de mémoire) et ne voit pas pourquoi il lui faudrait aimer ou respecter cette humanité-là."

(Sylvain Tesson, Petit traité sur l'immensité du monde)

samedi 5 avril 2008

Photos

"Si j'étais psychanalyste, je dirais que je prends en photo des choses qui ne meurent pas. Des choses précieuses..."

"Ces photos sont comme des poèmes visuels. Mon but, avec ces images, c'est que les gens aient envie de les accrocher sur leur bureau. A côté de leurs lettres. Là où ils écrivent."

(Patti Smith)

jeudi 3 avril 2008

Patiente

"Patiente. C'est mon statut et l'ordre auquel je dois obéir. C'est un nom, un adjectif et un verbe à l'impératif. Ce qui me caractérise, c'est d'obéir à cet ordre qui m'est sans cesse implicitement rappelé. Patiente. Attends. Attends que la crise passe, attends que la douleur diminue, attends que le sommeil te délivre. Attends que cela fasse de l'effet. Une heure, trois jours, deux semaines. Attends que les effets secondaires s'atténuent. Subis, supporte, accepte, résigne-toi. Fais avec. Laisse passer sur toi les heures, laisse les défiler comme si elles ne comptaient pas, comme si ta vie était déjà hors du temps, comme si ces moments ne t'étaient pas volés, comme si la douleur se diluait dans l'attente. Sois patiente."

(Claire Marin, Hors de moi)

mardi 1 avril 2008

"À l'hôpital...

... je vois ce que beaucoup ne découvriront que trop tard, sans avoir eu la possibilité de s'y habituer; le fait que l'on meurt à l'hôpital, dans un lit étranger et froid. Que l'on meurt en souffrant. La nuit, j'entends les râles, les quintes de toux chargées de la fatigue de toute une vie, j'entends les vieilles personnes pleurer comme des enfants. J'entends la colère. Je devine les bouches qui se ferment et refusent de manger malgré les exhortations des infirmières. J'imagine les poings qui se serrent d'abandonner toute dignité à cause de ce corps qui nous échappe et nous diminue. J'entends la résignation et l'abandon, les corps qui se délitent parce que l'on ne peut plus lutter pour quelques jours de plus dans cette existence horizontale, indigente."

(Claire Marin, Hors de moi)