lundi 20 novembre 2006

Cela a commencé par un picotement

"Ça a commencé par un picotement au petit doigt gauche. Mais qu'est-ce qu'un picotement quand on s'appelle Hélène Pelletier? La femme de 44 ans multiplie les déplacements pour effectuer son travail de représentante en produits pharmaceutiques, vaque aux soins de ses deux filles de 8 et 10 ans et, entre deux séances de jogging, prépare le déménagement prévu dans une nouvelle maison située dans les verdeurs de Hudson.

Mais n'empêche, le picotement persiste et commence à semer des doutes dans l'esprit d'Hélène et son mari. «J'avais du mal à ouvrir des pots, à manipuler les fermetures éclair, raconte-t-elle. Je me suis dit que c'était peut-être une grosse fatigue ou un début de burn-out.»

Hélène décide de consulter un neurologue qui lui dit que tout cela est un étirement lié au déménagement qu'elle vient de vivre. Elle décide toutefois de voir un deuxième spécialiste qui lui parle d'un virus.

«Je continuais toutes mes activités, mais j'avais de plus en plus de mal à coordonner mes mouvements, dit Hélène. Chaque matin, je mettais une demi-heure pour m'habiller. Parfois, il m'arrivait de tomber comme une roche.»

Un ami médecin la met alors en contact avec un troisième neurologue. Celui-ci, après un examen d'une heure, laisse tomber le diagnostic: Hélène est atteinte de la SLA,la sclérose latérale amyotrophique, plus communément nommée la maladie de Lou Gehrig d'après le joueur de baseball qui en est mort en 1941.

«Ça a été dévastateur, dit Hélène. Je n'arrivais pas à croire que moi, une femme en santé, qui faisait attention à ce qu'elle mangeait, pouvait avoir cette maladie. Pour moi, ma vie était finie.»

Il existe deux types de SLA: la forme bulbaire, qui donne à la personne atteinte une espérance de vie de six mois à deux ans, et la forme finale, qui offre de trois à cinq ans de vie. Hélène apprend qu'elle a la seconde forme de la maladie.

En juin 2005, elle découvre donc que ses cellules cérébrales meurent une à une et que celles-ci, rattachées aux muscles volontaires, arrêteront un jour de jouer leur rôle.

Graduellement, ceux qui souffrent de la SLÀ perdent l'usage de leurs bras et de leurs jambes, de leur faculté d'élocution, de déglutition et de respiration.

À la suite de la terrible nouvelle, les symptômes s'accélèrent pour Hélène. En novembre, elle ne peut plus se déplacer seule; en janvier, elle n'arrive plus à se
laver; en mars, elle n'arrive plus à se nourrir. Aujourd'hui, Hélène est totalement dépendante des autres.

«J'ai la chance d'avoir quelqu'un qui vient à la maison, dit-elle essoufflée. Elle
venait s'occuper de l'une de mes filles quand elle était bébé. Elle s'occupe maintenant de moi.»

Après avoir encaissé le coup, Hélène Pelletier a décidé de continuer à montrer le côté qu'elle a toujours préféré afficher. Elle, qui avait toujours rêvé de faire du bénévolat à sa retraite, s'est mise en tête d'organiser une campagne de financement pour aider la recherche sur cette maladie incurable.

«Je me suis rendu compte qu'on ne savait rien de cette maladie, dit-elle. Il n'y a aucun traitement pour stopper ou modérer sa progression. Présentement au Québec, il y a entre 500 et 700 personnes qui en souffrent. Au Canada, 2000 personnes en meurent chaque année et peu de gens savent de quoi il s'agit au juste.»

Au cours d'une soirée de gala qui a eu lieu en mars, elle a amassé près de 150 000$. L'argent a été officiellement remis le 27 octobre dernier à l'Institut neurologique de Montréal. Grâce à ce fonds, l'institution a pu embaucher un médecin spécialiste qui se concentrera pendant un an sur la recherche.

Hélène vise maintenant un second gala en 2007. Grâce à ces gestes, Hélène Pelletier espère lever le voile sur cette maladie qui touchait autrefois les personnes âgées et qui s'attaquent maintenant à celles qui sont dans la quarantaine.

«Pour moi, il est presque trop tard. Mais ça me fait du bien de savoir que je fais cela pour les autres», dit-elle.

Pour un don: Fondation de l'hôpital Royal Victoria, (514) 843-1543"

(Mario Girard, "Combat contre la maladie de Lou Gehrig",Source http://www.lapresse.ca/article/20061108/CPACTUEL/
611080838&SearchID=73263485818398, La Presse, édition du 8 novembre 2006)