mardi 25 novembre 2008

Quelques crève-coeurs

Diagnostic fatal

Impuissance lancinante

Devoir choisir pour toi ta dernière robe

La robe portée au mariage de ton fils

Te savoir seule la nuit dans cette inhospitalière chambre d'hôpital

Désir de cogner, de frapper, de lutter, de refuser ta mortalité, ma déesse-mère

Ma nièce venant vers moi en pleurs et tenant dans ses mains le dessin mal caché qu'elle t'avait offert à l'hôpital... L'horrible perspicacité d'une enfant de quatre ans

Ton fauteuil vide...roulant à vide

Ton odeur et ton rire... à jamais disparus

Ton odeur qui s'efface de tes vêtements et l'écho numérique de ton rire dans ma caméra

Ma dernière caresse dans tes cheveux, mon dernier baiser amoureux sur ton front glacé

Le dernier dessin que ta petite-fille a délicatement posé sur ton corps qu'on lui a dit endormi, avant que cette affreuse boîte ne t'encloisonne

Ta mère en pleurs

L'égarement de ton inconsolable époux, mon père

Le profond désespoir de ta première, refugiée furtivement dans mes bras

Le courage de ton dernier, émotivement campé à mes côtés

La belle feuille d'automne que ta petite-fille m'a spontanément donnée durant la cérémonie religieuse

Ma sereine et profonde colère qui continue de gronder

Cette nausée qui ne semble plus me quitter

Ta fin, le commencement de ma fin ?

Voir ton ombre à travers moi tous les jours dans le miroir

Ne pas savoir où tu es

Ta dernière leçon : "Ne pleures pas", la plus difficle à apprendre

Mes dernières et sincères paroles

Tes clins d'oeil et sourires d'encouragement alors que tu ne pouvais déjà plus parler

Cette envie de vomir, cette envie de mourir

Ce dernier maquillage, ce dernier massage, ce dernier bon repas et ce dernier verre de vin souhaités par toi qui te savait condamnée

Oui, on savait bien que ton pays, c'était la vie

Penser que tu aies attendu que je parte pour partir à ton tour

Maintenant

Vide, tout semble vide

Une immense vie vide

Où es-tu ? Es-tu bien maintenant ? Es-tu rien maintenant?

Hors de moi d'être hors de toi... pour une deuxième et dernière fois

Deuxième et irréversible rupture

Que veux-tu que cela me fasse de savoir que la peine s'efface un jour, en cet instant péniblement présent

Ne pas se résoudre aux adieux

Mais se résoudre à demeurer partiellement brisée, partiellement morte

Orpheline

Se questionner

À qui maintenant le tour... le macabre tour de manège ?