mercredi 18 mai 2005

La fin de nos attachements

"La mort ne nous permet pas d'avoir quoi que ce soit quand on meurt. Notre corps est incinéré ou enterré, et qu'a-t-on laissé ? Notre fils pour lequel nous avons amassé beaucoup d'argent que, de toute façon, il utilisera mal. Il héritera de nos biens, paiera les droits et traversera toutes les terribles angoisses de l'existence, tout comme on l'a fait soi-même. Est-ce ce à quoi on est attaché ? Ou est-on attaché à notre savoir, ayant été un grand auteur, un gran poète ou un grand peintre ? Ou est-on attaché aux mots, car les mots jouent un rôle très important dans notre vie ? Aux mots seuls. On ne regarde jamais derrière les mots. On ne voit jamais que le mot n'est pas la chose, que le symbole n'est jamais la réalité.
(...) La mort est une fin et elle a une importance extraordinaire dans la vie. Pas le suicide, pas l'euthanasie, mais la fin de nos attachements, de notre orgueil, de notre antagonisme ou de notre haine pour autrui. Quand on regarde holistiquement la vie, alors la mort, la vie, la détresse, le désespoir, la solitude et la souffrance, tout cela est qu'un seul et même mouvement. Quand on voit holistiquement, il y a une liberté totale vis-à-vis de la mort - ce qui ne veut pas dire que le corps ne va pas être détruit. Il y a un sens de la fin et par conséquent il n'y a pas de continuité - il y a une liberté à l'égard de la peur de ne pas pouvoir continuer.
Quand un être humain comprend la pleine signification de la mort, il y a la vitalité, la plénitude, qui se trouve derrière cette compréhension ; il est en dehors de la conscience humaine. Quand vous comprenez que la vie et la mort ne font qu'un - ils ne font qu'un quand dans votre vie, vous commencez à mettre fin aux choses - alors vous vivez côte à côte avec la mort, ce qui est la chose la plus extraordinaire à faire ; il n'y a ni le passé, ni le présent, ni le futur, il n'y a que la fin."

(Jiddu Krishnamurti, La flamme de l'attention)