"Nous vivons tous les jours le vertige de Blaise Pascal, la frayeur en face de l'immense. C'est l'angoisse bien humaine de celui qui se lève seul la nuit, s'assoit dans le silence et réfléchit à tout cela en engouffrant une rangée de biscuits aux pépites de chocolat. Dans les circonstances, n'est-il pas attendrissant, le geste de se croiser les doigts? Nous sommes embarqués sur une nef livrée aux vents, aux creux et aux tourbillons, nous sommes emprisonnés dans la navette, captifs, poussés par l'élan de vie, sans autre choix que de filer vers l'avant sur cette route incertaine nommée existence. C'est parfois tranquille, souvent tempétueux, quelquefois dramatique. La durée du voyage ne se négocie pas. Sa direction non plus. Notre avenir est un grand vide indéterminé que nous comblons en étant. Seulement cela, être."
(Serge Bourchard, Les yeux tristes de mon camion)