"La science est un effort - souvent désespéré, c'est vrai, et peut-être parfois même pathétique, reconnaissons-le - pour tenter de lire dans le monde autre chose que ce que nous y avons nous-même instillé. Récuser cette démarche, ce n'est pas seulement se priver des richesses d'un monde protéiforme, c'est aussi - je le crains - faire preuve d'arrogance en oubliant que l'Univers ne se réduit pas à ce que nous souhaitons qu'il soit ou à ce que nous percevons directement de lui.
La science est une "désanthropocentrisation" du réel. Elle tente de nous mettre en rapport avec un ailleurs. Elle tente de frayer un chemin dans l'au-delà de notre vision immédiate. Elle tente de présenter un monde qui n'est pas la simple traduction de nos propres besoins ou désirs. L'astronomie, par exemple, montre que l'aspect de la voûte céleste dépend largement de la manière dont celle-ci est scrutée. Nos yeux ne voient presque rien. La lumière à laquelle nous sommes sensibles n'est qu'une fraction absolument dérisoire de l'ensemble des lumières (disons des ondes électromagnétiques) existantes. Quand le ciel est observé suivant ces autres lumières il présente un tout autre aspect."
(Aurélien Barrau, De la vérité dans les sciences)